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La bataille de Nauloque (-36 av. J.-C.)

La montée de Sextus Pompée

Héritier de Pompée le Grand

Sextus Pompée, fils du célèbre général Pompée, rassemble les derniers partisans républicains après la défaite de son père et l'élimination des forces pompéiennes. Refusant la domination des triumvirs, il établit son pouvoir en Sicile et en Sardaigne, bases stratégiques qui lui permettent de contrôler les routes maritimes cruciales de la Méditerranée.

Une menace pour le ravitaillement de Rome

La flotte de Sextus bloque les approvisionnements céréaliers en provenance d’Afrique et de Sicile, mettant l’Italie en danger de famine. Par ses actions, il défie directement Octave et revendique sa légitimité en tant qu’adversaire des triumvirs.


Les efforts diplomatiques et militaires des triumvirs

L’aide de Marc Antoine

Face à la menace croissante de Sextus Pompée, Octave sollicite le soutien de Marc Antoine, alors maître de l’Orient. Ce dernier fournit initialement une partie de sa flotte pour renforcer les forces navales d’Octave. Cependant, les tensions politiques entre les deux triumvirs compliquent la situation.

Les préparatifs d’Agrippa

Octave confie la direction des opérations militaires à son fidèle lieutenant, Marcus Vipsanius Agrippa. Agrippa se distingue par sa capacité à moderniser et entraîner la flotte romaine, développant de nouvelles tactiques et armes navales, dont le harpax, un grappin révolutionnaire.


La montée en puissance d’Agrippa

Entraînement intensif

Agrippa prépare ses forces sur des lacs intérieurs, une innovation stratégique qui permet aux marins de manœuvrer en toute sécurité tout en perfectionnant leurs techniques de combat. Ces exercices renforcent la cohésion et la discipline de la flotte romaine.

Mobilisation des ressources

Pour contrer Sextus Pompée, Octave mobilise d'importants moyens financiers et logistiques. Les ports d’Italie sont réorganisés pour accueillir et armer les nouveaux navires d’Agrippa, marquant un effort de guerre d'une ampleur inédite.


Les premiers affrontements

Escarmouches en Méditerranée

Avant la bataille décisive, plusieurs combats éclatent entre les flottes d’Agrippa et de Sextus. Ces affrontements permettent à Agrippa de tester ses nouvelles tactiques et de limiter les ravitaillements de Sextus, fragilisant sa position.

Tensions internes au triumvirat

Malgré l’aide initiale de Marc Antoine, des tensions surgissent entre Octave et son allié. Antoine reproche à Octave de ne pas lui avoir restitué les navires prêtés. Ces différends annoncent une rupture future entre les deux hommes.


Vers la bataille décisive

Le choix de Nauloque

Agrippa concentre ses forces dans le nord-est de la Sicile, près de Nauloque. Ce port stratégique offre un champ de bataille idéal pour affronter la flotte de Sextus Pompée et couper ses voies de retraite.

Une confrontation inévitable

Sextus, conscient que sa domination en Méditerranée est menacée, décide d'engager ses forces dans un affrontement naval décisif. La bataille de Nauloque se profile comme le dernier acte de sa résistance contre les triumvirs.



La bataille de Nauloque

Le déploiement des flottes

Le 3 septembre 36 av. J.-C., les flottes d’Agrippa et de Sextus Pompée se font face près de Nauloque, dans une région stratégique du nord-est de la Sicile. Chacune aligne 300 navires. Si Sextus compte sur la rapidité et la maniabilité de ses unités, Agrippa mise sur la supériorité technique et l'entraînement rigoureux de ses équipages.

L’innovation tactique du harpax

Agrippa déploie le harpax, une arme innovante conçue pour immobiliser les navires ennemis en lançant un grappin à longue portée relié par un treuil. Cet outil permet à ses forces de tirer les navires adverses à portée d'abordage, neutralisant leur mobilité. Couplé à une version améliorée du corvus, une passerelle d'abordage équipée de pointes, le harpax s'avère déterminant pour capturer les navires de Sextus.

Un combat acharné

La bataille est longue et violente. Les marins de Sextus opposent une résistance farouche, mais la supériorité technique et l’entraînement des troupes d’Agrippa inversent rapidement la tendance. Les navires ennemis, immobilisés et submergés par les soldats romains, tombent un à un. La flotte de Sextus est progressivement décimée.

Une défaite écrasante

Sur les 300 navires de Sextus Pompée, seuls 17 parviennent à échapper à la destruction ou à la capture. Agrippa, en revanche, ne perd que trois navires, démontrant l’efficacité de sa stratégie et des innovations techniques employées. Cette victoire marque un tournant décisif dans la lutte contre Sextus Pompée.


Les conséquences de la bataille de Nauloque

1. La chute de Sextus Pompée

Avec la destruction de sa flotte et la perte de son contrôle sur la Sicile, Sextus Pompée voit sa puissance s’effondrer. Contraint de fuir avec les maigres restes de ses forces, il atteint Messine avant de se diriger vers Milet en Orient. Là, en 35 av. J.-C., il est capturé et exécuté sur l’ordre de Marc Antoine, mettant définitivement fin à la résistance des pompéiens.

2. La consolidation du pouvoir d’Octave

La victoire d’Agrippa permet à Octave de reprendre le contrôle total de la Sicile et de la Sardaigne, rétablissant les routes d'approvisionnement vitales en blé pour l'Italie. Octave renforce ainsi son autorité sur l’Occident et se positionne comme le protecteur du ravitaillement de Rome, un rôle qui lui confère un immense prestige politique.

3. L’élimination de Lépide

Après la bataille, Lépide, qui avait participé à la campagne avec ses propres forces, revendique un rôle plus important et tente de s’approprier la Sicile. Octave, habile stratège politique, exploite cette ambition pour intriguer contre lui. En privant Lépide de ses soutiens, Octave l’écarte définitivement de la scène politique et militaire. Lépide est relégué à une retraite forcée en tant que pontifex maximus, un titre honorifique sans pouvoir réel.

Un pas de plus vers la suprématie d’Octave

La victoire de Nauloque marque une étape majeure dans l’ascension d’Octave. Avec Sextus éliminé et Lépide neutralisé, il reste le seul maître de l’Occident romain. Cette consolidation de pouvoir pave la voie au futur affrontement entre Octave et Marc Antoine, qui culminera à Actium en 31 av. J.-C., annonçant la fin de la République et le début de l'Empire.


Sources :

  • Appien, Guerres civiles (Livre V).
  • Dion Cassius, Histoire romaine.

Auteur : Stéphane Jeanneteau

Mars 2011

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