Après la restauration de la vénération des icônes en mars 843, le gouvernement de l'Empire byzantin dirigé par l'impératrice-régente Théodora et le logothète Théoctiste lancent une offensive soutenue contre le califat abbasside et ses vassaux, le principal adversaire politique et idéologique de l'empire. Cette posture agressive est facilitée d'une part par la stabilité interne de l'Empire byzantin grâce à la fin de la controverse iconoclaste et d'autre part, par la volonté de justifier la nouvelle politique au travers de victoires militaires contre les Musulmans.
La première de ces campagnes est une tentative de reconquête de l'Émirat de Crète menée par Théoctiste en personne. Cette expédition obtient d'abord quelques succès mais se termine en désastre. Après avoir remporté une victoire contre les Arabes de Crète, Théoctiste a vent d'une rumeur selon laquelle Théodora voudrait nommer un nouvel empereur, peut-être son frère Bardas. Théoctiste retourne précipitamment à Constantinople pour découvrir que cette rumeur est infondée mais en son absence, l'armée byzantine a été mise en déroute par les Arabes.
La bataille
En 844, selon les sources byzantines, Théoctiste apprend que les Arabes ont lancé une invasion de l'Asie Mineure byzantine dirigée par un certain 'Amr, probablement Umar al-Aqta, le chef de l'émir semi-autonome de Malatya. Les sources arabes ne mentionnent pas explicitement cette campagne. Toutefois, l'historien russe Alexander Vasiliev la relie à une expédition mentionnée dans les poèmes d'Abū Tammām et Al Buhturi, dirigée par le général Abu Sa'id et se déroulant lors de la régence de Théodora. La participation d'Umar al-Aqta est probable car il aide souvent les Abbassides dans leurs raids contre les Byzantins. Selon les récits arabes, les troupes d'Abu Sa'id comprennent des hommes venant des émirats frontaliers de Qaliqala (Erzurum) et Tarse. Les forces arabes s'unissent à Ardandun (peut-être le fort frontalier de Rhodandos) avant de pénétrer dans les thèmes byzantins de Cappadoce, d'Anatoliques, des Bucellaires et de l'Opsikion. Les troupes de Sa'id mettent à sac Dorylée et atteignent même le rivage du Bosphore.
Théoctiste dirige l'armée devant affronter les envahisseurs mais il est lourdement vaincu près du Mauropotamos (« La Rivière Noire »). La localisation de celle-ci, si elle est bien une rivière et non un simple toponyme, est l'objet de débats. Elle est fort probablement un affluent du Sangarios en Bythinie ou de l'Halys en Cappadoce. Quoi qu'il en soit, les Byzantins ne souffrent pas seulement de lourdes pertes, en effet, de nombreux officiers importants font défection et rejoignent les Arabes6. Théoctiste parvient à regagner Constantinople où il blâme Bardas pour les récentes défaites avant de l'exiler en-dehors de la capitale.
Conséquences
Les Abbassides ne peuvent exploiter leur victoire à cause de l'instabilité interne du califat. De même, les Byzantins préfèrent focaliser leurs forces sur la conquête en cours de la Sicile par les Aghlabides. De ce fait, une ambassade byzantine est envoyée à Baghdad en 845 et est chaudement reçue. Les Abbassides envoient à leur tour une ambassade à Constantinople et les deux empires signent à cette occasion une trêve et un accord d'échange de prisonniers qui a lieu sur la rivière Lamos le 16 septembre 845. Peu après, un raid hivernal mené par le gouverneur arabe de Tarse échoue de façon désastreuse. Après cet évènement, la frontière byzantino-arabe reste calme durant les six années suivantes.