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Bataille  de l'Hydaspe  -326

Après que le Roi Macédoine Alexandre le Grand  ait vaincu en 328 les derniers représentants de l'Empire Achéménide, les forces de Bessos et Spatamenès les anciens Satrapes de Bactriane, il décida, en 327, de commencer une nouvelle campagne pour étendre son Empire vers l'Inde. Il s'empara de la Bactriane, de la Sogdiane et du Gandhara où il reçut des émissaires du Roi Omphis de Takshashîlâ  qui craignait les ambitions de son voisin, le Roi Pôros du Paurava , allié au Prince du Cachemire afin de soumettre le Pendjab sous sa domination.

Dispositif initial sur les rives de l'Hydaspe.

Selon certains spécialistes ce serait afin de répondre favorablement à ces Ambassadeurs qu'Alexandre se lança à la conquête de l'Inde. Il pensait en effet qu'un allié puissant dans la région représentait une certaine garantie de succès. Au printemps 327, il quitta Bactres à la tête d'une troupe considérable. Il traversa les monts Paraponisadès  une chaîne de hautes montagnes en Afghanistan et au Pakistan actuel (Dont Aristote [Philosophe Grec, 384-322] était convaincu qu'ils étaient l'extrémité orientale du monde) et passa par Alexandrie du Caucase (Actuelle Bagram près de Kaboul) où il fut accueilli par le Roi Omphis, qui lui offrit quelques éléphants de guerre. 

À l'été 327, Alexandre chargea Héphestion et Perdiccas de soumettre les peuples vivant sur la rive Sud du Cophen, la rivière qui descend de la vallée de l’actuelle Kaboul vers l’Indus, tandis que lui s’occupait de la rive septentrionale, secondé par son Général Cratère. Pour ces deux premiers Généraux il n'y eut guère de problème et ils atteignirent l'Indus bien avant lui. Aurel Stein et Sir Fred H.Andrews nous disent que pour le Roi par contre la tâche fut plus rude. Il fut confronté aux populations montagnardes, les Assacènes, qui opposèrent une forte résistance à l'été 327, et il eut de grandes difficultés à prendre leur capitale forteresse, Aornos (Identifiée à Pir Sar, au Pakistan). Alexandre fut blessé lors de la bataille, frappé d'une flèche qui perça son armure et avec elle la plèvre et le poumon, mais il échappa à la mort. Finalement, au printemps 326, il atteignit l’Indus, où Héphestion et Perdiccas avaient construit un pont, qu'ils franchirent à cette même période. L’armée fit une halte d'un mois à Takshashîlâ, mais repris au début de l'été 326 la route pour aller combattre Pôros qui voulait interdire aux Macédoniens, avec une importante armée, l'accès à l’Hydaspe.

Au printemps 326, Pôros fit cantonner ses troupes, sur la rive Sud (rive gauche) de l'Hydaspe dans le but de repousser toutes tentatives de passages de l'armée Macédonienne. Arrivé proche des troupes de Pôros, Alexandre établit lui son campement dans les environs de la ville de Jhelum sur la rive droite de la rivière. Cette dernière était profonde et rapide, gonflée par la fonte des neiges et les premières pluies de mousson, ce qui fait qu'ayant peu d'endroits de passage praticables, des forces d'attaque s'en trouvaient rapidement condamnées. Alexandre savait qu'une approche directe avait donc peu de chances de succès et il essaya de trouver des gués alternatifs. Il attendit plusieurs jours où il déplaçait ses troupes montées le long de la berge de la rivière chaque nuit sans éveiller la surveillance des Indiens. Il organisa une campagne de désinformation, faisant passer, par les paysans locaux, le message qu'il considérait que l'eau était trop haute pour tenter un franchissement, désinformation qui arriva rapidement à Pôros. Finalement, au bout de 28 nuits, il finit par trouver un passage convenable, à environ 27 km. en amont de son camp.

Son plan était une manœuvre classique de tenailles. Il laissa son Général Cratère  avec le gros des troupes et il décida de traverser en personne, avec sa cavalerie d'élite de "Compagnons" et ses hypaspistes, le fleuve dans une région boisée afin de prendre Pôros à revers. Son contingent était composé, selon Arrien de 6.000 fantassins et 5.000 cavaliers, mais il est probable qu'ils étaient en plus grand nombre. Cratère était positionné à deux gués prêt à soutenir l'attaque avec toutes ses troupes ou, à l'inverse, tenir la position si Pôros débordait Alexandre. Celui-ci déplaça donc ses hommes en silence en amont, puis il traversa la rivière dans le plus grand secret, en utilisant des flotteurs en peau remplis de foin, ainsi que des tous petits navires, des galères coupées en deux. Selon Arien, il débarqua sur un ilot qui lui servit de base en cette période de mousson pour traverser le reste de la rivière. 

Dans le même temps Cratère faisait des va et viens fréquents le long de la rivière, donnant l'impression à Pôros qu'il s'apprêtait à la traverser. Pôros, voyant toujours sur l'autre rive ce corps de troupe principal, ne craignait pas le danger. Cependant il finit par percevoir la manœuvre de son adversaire et envoya une petite cavalerie et des chars sous le commandement de son fils, également nommé Pôros, pour le combattre, en espérant qu'il serait en mesure d'empêcher sa traversée. 

Alexandre était personnellement déjà sur l'autre rive et il envoya ses archers à cheval contrecarrer la cavalerie du jeune Pôros. Selon Kaushik Roy, celui-ci se retrouva à faire face à une force inattendue et ses chars furent immobilisés par la boue près de la rive de la rivière. Le jeune Pôros n'eut qu'une solution, la fuite parmi les morts, sa petite armée étant en déroute. Lorsque cette nouvelle arriva à son "père", il comprit qu'Alexandre avait traversé la rivière de son côté et se hâta de lui faire face avec la meilleure partie de son armée, laissant derrière lui un petit détachement pour perturber le débarquement de la force de Cratère au cas où ce dernier tenterait de traverser lui aussi. 

Attaque combinée de l'infanterie et de la cavalerie macédonienne.

Le déroulement

La bataille débuta réellement lorsque Pôros atteignit le point où l'armée d'Alexandre arrivait, il déploya ses forces et commença l'attaque. Les Indiens étaient rangés avec de la cavalerie sur les deux flancs, leur centre comprenant l'infanterie avec des éléphants de guerre, entre ou devant elle, à intervalles égaux. L'infanterie Macédonienne lourde était en infériorité numérique face à l'infanterie Indienne, 1 contre 5. De plus, selon Arrien et John Frederick Charles Fullerles, les 200 éléphants de guerre étaient une difficulté supplémentaire pour Alexandre car il devait revoir sa stratégie habituelle qui consistait à couper les lignes adverses, afin de lancer la cavalerie dans la brèche, ce qui avait été d'une efficacité redoutable à la bataille de Gaugamèles. Ajouté à cela que les éléphants rendaient les chevaux Macédoniens si nerveux, qu'ils refusaient toute attaque frontale. 

Le Roi fut donc forcé de revoir sa stratégie. Il envoya un groupe de cavaliers, sous le commandement de Koinos  contourner les Indiens dans le but de les attaquer par l'arrière, ce qui les forceraient à diviser leurs forces pour faire face à l'ennemi sur deux fronts. Dans le même temps, il lança, avec lui-même à la charge, une attaque massive de cavalerie contre le flanc gauche de Pôros. Il supposait à juste titre que ce dernier serait forcé de déplacer sa cavalerie, de son aile droite sur son aile gauche. Ce que fit l'Indien, ce qui permit à la cavalerie Macédonienne de Koinos d'attaquer sur ses arrières l'armée Indienne, comme Alexandre l'avait prévu. Les Indiens tentèrent de former une double phalange, mais les manœuvres compliquées nécessaires apportèrent encore plus de confusion dans leurs rangs ce qui rendit plus facile l'attaque de la cavalerie Macédonienne. 

Pôros  contrairement à l'habitude des Rois Indiens, commandait depuis le haut d'un éléphant au lieu d'un char, et il prit la tête de la charge des éléphants. Les phalangistes Macédoniens et l'infanterie Perse de Cratère, traversèrent alors le fleuve, il stoppèrent brutalement la charge des éléphants qui leur faisaient face. Les éléphants causèrent toutefois de lourdes pertes à la phalange, avec leurs défenses équipées de pointes de fer. Mais repoussés par les piques denses Macédoniennes, ils s'affolèrent semant beaucoup de ravage dans leurs propres lignes. Un grand nombre de cornacs des éléphants furent tués. La cavalerie Indienne fuit parmi les éléphants espérant leur protection, mais les bêtes étaient hors de contrôle et se retiraient épuisées du champ de bataille, laissant le reste de l'armée de Pôros encerclé par la cavalerie et la phalange Macédoniennes. 

Après de lourdes pertes, Pôros malgré un combat courageux, cerné de tous côtés et gravement blessé, se laissa capturer. Pour récompenser son courage il eut droit aux honneurs d'Alexandre aux termes des négociations. 

Il est difficile d'estimer les pertes des deux camps, mais les Indiens perdirent probablement toute leur cavalerie, beaucoup de leur infanterie et plus de 100 éléphants de guerre. Arrien avance 20.000 fantassins et 3.000 cavaliers tués. En ce qui concerne les Macédoniens. Alexandre captura plus de 80 éléphants, sa cavalerie fut épargnée mais il perdit une partie importante de son infanterie. Selon Arrien, les pertes Macédoniennes ne se furent que de 310, 80 fantassins et 230 cavaliers. Les historiens modernes, comme John Frederick Charles Fuller, considèrent plus réaliste le chiffre donné par Diodore de Sicile d'environ 1.000 hommes, 700 fantassins et 280 cavaliers, qui semble effectivement plus plausible compte tenu du succès partiel des éléphants de guerre Indiens. L'historien Peter Green estime qu'Alexandre perdit 4.000 hommes, la plupart étant des phalangistes qui subirent le combat contre les éléphants, car les chevaux de la cavalerie Macédonienne avaient refusé de s'en approcher. 

 

Après la bataille

La bravoure, les compétences de guerre et l'attitude princière de Pôros impressionnèrent grandement Alexandre, Blessé à l'épaule, Alexandre lui avait demandé comment il voulait être traité. "Traitez-moi comme un Roi traiterait un autre Roi" avait-il répondu. En dépit de la défaite de l'Indien, il épargna sa vie et le traita comme un Roi, puisqu'il lui permit de conserver son trône. C'était aussi plus ou moins intéressé de la part du Macédonien car il avait besoin de remettre un peu de stabilité dans une région aux peuplades turbulentes et Pôros avait l'autorité qu'il fallait pour cela. Après avoir soumis le Pendjab actuel, le Roi Macédonien fonda deux villes dans cette région, l'une à l'endroit de la bataille appelée Alexandrie Nicée du Pendjab, en commémoration de son succès et l'autre sur l'autre rive de l'Hydaspe appelée Alexandrie Bucéphalie, en l'honneur de son fidèle destrier, qui mourut peu de temps après cette bataille. Il commémora aussi cette victoire en frappant monnaie à l'effigie de Pôros. 

En 326, l'armée d'Alexandre approcha les limites de l'Empire de la dynastie Nanda (Famille qui régna sur le Nord de l'Inde entre 343 et 321, l'Empire Nanda s'étendait du Bengale au Pendjab). Là l'armée Macédonienne épuisée par la campagne continue et effrayée à la perspective de faire face à une autre armée Indienne gigantesque, s'opposa à Alexandre, elle refusa de continuer et exigea de retourner à l'Ouest. Alexandre finalement céda et fit route vers le sud, le long de l'Indus, les limites de son Empire. 

Les principales raisons de la défaite Indienne furent dues à l'utilisation des tactiques d'Alexandre et à sa supériorité managériale et technologique. De plus leur cavalerie et infanterie étaient inférieure professionnellement à celles des Grecs. Ils n'avaient ni une infrastructure militaire soutenue, ni une armée permanente. 

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