En 52 av. J.-C., la guerre des Gaules atteint son paroxysme. Vercingétorix, chef des Arvernes, organise une révolte massive contre la domination romaine, ralliant de nombreuses tribus gauloises, dont les Parisii. César, après une série de campagnes, fait face à une Gaule presque entièrement unie contre lui. Tandis qu'il dirige une campagne sur Gergovie, il confie à son lieutenant Labiénus une mission cruciale : soumettre Lutèce et ses environs pour sécuriser l’arrière-garde romaine et empêcher de nouvelles insurrections.
Lutèce, l’actuelle Paris, située sur une île de la Seine, occupe une position stratégique au cœur des routes commerciales et fluviales de la Gaule. Les Gaulois, sous la direction de Camulogène, un chef militaire expérimenté, mobilisent des forces importantes pour défendre la ville et ses environs. La bataille de Lutèce s’inscrit dans une série d’affrontements visant à couper les routes de ravitaillement romaines et à harceler les légions de César.
La campagne de César en 52 av. J.-C.
Labiénus, à la tête de quatre légions et d’une partie de la cavalerie romaine, se dirige vers Lutèce après avoir pris et pillé Metlosedum (probablement Melun). À son arrivée, il découvre que Camulogène a fortifié les environs de Lutèce, utilisant les marais de la Bièvre pour freiner l’avancée romaine. Labiénus tente d’assiéger ces positions en construisant des chaussées, mais il est contraint de se retirer devant la résistance acharnée des Gaulois.
Camulogène adopte une stratégie inspirée de Vercingétorix, consistant à éviter les batailles frontales en terrain défavorable et à utiliser la tactique de la terre brûlée. Lutèce est incendiée, ses ponts détruits, et l’armée gauloise se positionne sur des hauteurs stratégiques pour couper toute retraite romaine et exploiter l’environnement défensif des marais.
Conscient du danger, Labiénus élabore une ruse audacieuse. À la nuit tombée, il divise ses forces en trois groupes :
Le lendemain matin, Camulogène, trompé par les mouvements de diversion, pense que les Romains fuient. Il divise son armée en trois corps pour poursuivre les Romains et protéger ses positions. Cette erreur expose ses forces.
Dans la plaine de Grenelle, entre les villages d’Issy et de Vaugirard, les Romains engagent les Gaulois. La VIIe légion, positionnée à l’aile droite, enfonce rapidement les lignes ennemies, tandis que la XIIe légion, à gauche, rencontre une résistance plus opiniâtre sous la direction personnelle de Camulogène.
La VIIe légion, ayant poursuivi les Gaulois en fuite, revient sur le champ de bataille et attaque les forces gauloises restantes par l’arrière. Ce mouvement décisif brise la résistance gauloise. Camulogène, refusant de battre en retraite, périt les armes à la main. Les forces gauloises, encerclées, subissent un carnage : seuls quelques combattants parviennent à s’échapper vers les collines boisées.
La victoire de Labiénus permet aux Romains de sécuriser le contrôle de Lutèce et des routes fluviales stratégiques sur la Seine. Bien que la ville soit incendiée, les Gaulois perdent un point clé dans leur réseau de défense.
La mort de Camulogène et la destruction de ses forces affaiblissent la coalition gauloise. Les tribus environnantes hésitent à poursuivre la résistance face à la supériorité tactique des Romains.
Labiénus rejoint sans encombre Agédincum (Sens), où il récupère les bagages de l’armée, puis César. Cette victoire contribue à stabiliser l’arrière-garde romaine et permet à César de concentrer ses forces sur Gergovie.
La bataille de Lutèce met en évidence l’ingéniosité tactique des Romains, capables de transformer une position désavantageuse en victoire grâce à la ruse et à la discipline. Labiénus se distingue par sa capacité à déjouer les plans ennemis et à exploiter les erreurs stratégiques de Camulogène. Cependant, la résistance acharnée des Gaulois montre également leur détermination à contester la domination romaine, même face à des forces supérieures.
Auteur : Stéphane Jeanneteau
Mars 2011