Le vieux roi numide, allié des Romains contre Hannibal à la bataille de Zama, Massinissa est mort en - 148. Scipio Emilien partage ce royaume puissant entre les trois fils de Massinissa, mais la mort rapide de deux d'entre eux laisse Micipsa seul régner pendant trente ans, en poursuivant la politique de son père et en gardant de bonnes relations avec Rome. En - 118, à sa mort, le roi Micipsa lègue son royaume à ses deux fils, Hiempsal et Adherbal et à son neveu qu'il a adopté, Jugurtha. Ce dernier a participé à la guerre contre Numance et connaît donc quelques membres de la noblesse romaine. Les deux fils de Micipsa sont pétris de culture grecque. L'entente entre les 3 princes est impossible. Rome n'intervient pas mais se félicitent du partage du royaume de Numidie que Jugurtha refuse et il fait vite assassiner Hiempsal à Thirmida. La majorité des Numides est fidèle à Adherbal, mais l'élite de l'armée soutient Jugurtha. Ce dernier arme le maximum de troupes, occupe les villes et soumet la Numidie. Adherbal prévient Rome du meurtre de son frère et confiant dans sa supériorité numérique, livre bataille à Jugurtha. Il est vaincu et chassé du royaume, il se rend à Rome où il demande l'aide du Sénat.
Jugurtha envoie à Rome des députés avec beaucoup d'or et la mission d'en user généreusement avec les amis de Jugurtha et ceux qui ont de l'influence. Et rapidement, Jugurtha obtient une majorité de sénateurs qui lui est favorable. Résultat : point de condamnation mais une commission sénatoriale est envoyée en Numidie pour présider au partage. La capitale Cirta et la partie orientale du royaume, riche en ports mais la moins fertile est adjugée à Adherbal. La partie occidentale, plus riche et plus peuplée est le lot de Jugurtha en - 117. Et la commission sénatoriale retourne à Rome. Jugurtha provoque Adherbal et le pousse à l'attaquer, mais celui ci laisse les cavaliers de son cousin piller ses terres et envoie ses plaintes à Rome.
Alors Jugurtha s'impatiente et, avec une troupe bien armée, envahit le royaume de son cousin. Il emmène les troupeaux qu'il saisit, pille et détruit des villes pour obliger Adherbal à l'attaquer. Mais ce dernier renonce à se venger et compte sur les Romains. Alors Jugurtha attaque le royaume de son cousin avec une grande armée, pour une conquête ouverte. Adherbal est obligé de défendre son royaume et comme il a une armée plus nombreuse, il marche contre Jugurtha. Les deux armées prennent place à Rusicada près de Cirta et s'apprêtent à y passer la nuit. Et avant l'aube, selon Salluste, les soldats de Jugurtha tombent sur le camp d'Adherbal endormi et massacrent ou mettent en fuite l'adversaire. Adherbal parvient à s'échapper avec quelques cavaliers et se réfugie à Cirta. Le siège commence aussitôt et les nombreux italiens établis dans la ville la défendent avec énergie.
Le Sénat averti, envoie trois jeunes gens chargés de notifier aux deux rois les décisions du Sénat et du peuple : mettre bas les armes et régler leurs différents par arbitrage. Ils ne peuvent voir Adherbal, Jugurtha refusant net et maintenant le siège. Adherbal envoie deux hommes qui l'ont accompagné depuis le camp de Rusicada vers le Sénat et ils réussissent à traverser les lignes ennemies. Le siège de Cirta continue, la cité est investie et des tours sont construites autour des murailles. En - 113, le Sénat décide d'envoyer ... une autre ambassade dirigée par Marcus Scaurus, le héros du parti aristocratique, un ancien consul et le vainqueur des Taurisques. Jugurtha qui n'a pas réussi à se saisir d'Adherbal, se rend à Utique où Scaurus l'a convoqué. Les débats s'embrouillent et malgré les menaces et le temps passé, l'ambassade repart sans aucune concession de Jugurtha.
Les Italiens qui défendent Cirta, conseillent à Adherbal de se rendre à Jugurtha, comptant sur la grandeur de Rome pour assurer leur protection. Cirta capitule en - 112. Jugurtha fait périr Adherbal dans les supplices et donne l'ordre d'exécuter toute la population mâle adulte, africaine ou italienne. L'aristocratie romaine corrompue tente au Sénat, de faire oublier les crimes de Jugurtha dans des délibérations sans fin. Enfin Gaius Memmius, le tribun du peuple éloquent, menace d'appeler un jour les nobles à rendre compte de leurs actions en justice, les chevaliers, plus atteints par le massacre des négociants italiens se montrent déterminés, le Sénat se décide enfin à déclarer la guerre et le nouveau consul Lucius Calpurnius Bestia est désigné pour commander l'armée d'Afrique en - 111
LE CONSUL LUCIUS CALPURNIUS BESTIA
Jugurtha est surpris de ce changement de politique et il envoie son fils au Sénat afin de corrompre tout ceux qu'il pourrait. Mais le consul Bestia obtient qu'il ne soit pas admis à Rome. L'armée du consul comprenant Marcus Scaurus, descend jusqu'à Rhegion, est transportée en Sicile, puis de là en Afrique. Une fois débarqué, le consul entre vivement en campagne, remporte quelques combats, fait de nombreux prisonniers et prend quelques villes. Il se dirige vers le Bagradas (la Medjerdah) et reçoit la soumission des cités éloignées du siège de la monarchie. Le roi de Mauritanie, Bocchus, propose son alliance aux Romains et envoie des délégués demander un armistice. Mais ses envoyés n'ont pas d'argent pour acheter l'alliance romaine, c'est un échec.
Jugurtha, qui sait comment traiter les Romains, s'apprête à acheter une trêve, mais quand il sait que Scaurus est présent, il va discuter les conditions de la paix avec le consul. Officiellement, Jugurtha se soumet et un conseil de guerre transforme ces préliminaires en traité. Jugurtha doit payer une modique amende, livrer trente éléphants, du bétail et des chevaux en grand nombre. C'est la paix et Bestia rentre à Rome pour l'élection des magistrats. Mais à Rome c'est un vent de fronde qui souffle, Gaius Memmius obtient une "sommation à comparaître" pour Jugurtha assortie d'un sauf-conduit. La plèbe est particulièrement indignée. En l'absence de Bestia, Jugurtha a récupéré ses éléphants à prix d'or. Le prêteur Cassius part donc en Numidie, et convainc Jugurtha qu'il vaut mieux faire l'expérience de la mansuétude du peuple romain que celle de sa force. Jugurtha, ne voulant pas remettre en cause le traité signé récemment, accepte.
Jugurtha paraît donc à Rome devant le peuple romain qui veut lui faire un sort, mais quand Gaius Memmius l'interroge, un veto est prononcé pour interdire à Jugurtha de répondre. Le Sénat délibère sur la validité du traité de paix. Spurius Postumius Albinus, un des deux consuls de - 110, incite un autre petit fils de Massinissa, Massiva à revendiquer le trône. Ce dernier venait de quitter la Numidie après la mort d'Adherbal. Bomilcar, un homme de Jugurtha, élimine ce concurrent inattendu. Cette dernière action mit le comble à l'indignation. Le Sénat casse le traité et dans l'hiver - 111 - 110, ordonne l'expulsion de Jugurtha. En la quittant il s'exclame à plusieurs reprises, selon Tite-Live :
"Urbem venalem et mature perituram si emptorem invenerit !" "O ville à vendre ! elle disparaîtra bientôt, si elle trouve un acheteur !""
LE CONSUL SPURIUS POSTUMIUS ALBINUS ET SON FRÈRE AULUS
Spurius Albinus commande l'armée d'Afrique, forte de 40 000 hommes. Mais cette armée est indisciplinée. Les officiers comme les légionnaires ont noué des relations avec l'ennemi. De son côté, Jugurtha joue avec l'armée romaine qu'il connaît bien, refuse le combat, manœuvre sans cesse et fournit de l'or au consul. Le temps passe et Albinus doit rentrer à Rome présider les comices consulaires. Il laisse donc le soin de diriger l'armée à son frère Aulus qui servait comme légat et qu'il nomme pro-prêteur. Ce dernier voulant terminer ce conflit et effrayer Jugurtha, entreprend en plein hiver le siège de Suthul, une cité difficile d'approche et aussi à emporter. Le trésor de Jugurtha y est déposé selon Salluste. C'est un échec, en raison du temps, les environs immédiats du mur d'enceinte sont devenus un véritable marécage.
Aulus néanmoins fait procéder en hâte à toutes les opérations d'un siège classique en - 109. Jugurtha de son côté laisse croire à Aulus qu'une entente est possible et s'éloigne, entraînant ainsi les Romains dans une région désertique. Pendant ce temps les Numides corrompent les alliés des Romains et le primipile de la troisième légion. Quand Jugurtha estime que la situation est mûre, une attaque de nuit est lancée sur le camp romain. C'est la grande surprise, les légionnaires tentent de se défendre, mais une cohorte ligure et deux escadrons thraces ainsi que quelques légionnaires passent à l'ennemi. Le primipile de la troisième légion laisse le passage aux Numides sur la portion de retranchement dont il avait la garde. Et les Numides se précipitent par là, les légionnaires s'enfuient, beaucoup en lâchant leurs armes et se regroupent sur une colline. Le camp est pillé et le lendemain, Jugurtha a un entretien avec Aulus et lui fait comprendre, qu'il est en mesure d'exterminer son armée mais que si Aulus est disposé à traiter, il passera sous le joug avec tous ses hommes et il seront libres. Le traité de paix signé avec Bestia que le Sénat a brisé, est renouvelé. Les Romains ont dix jours pour évacuer la Numidie. Aulus se résigne et la paix est conclue comme le voulait Jugurtha. Les nombreuses tribus du désert viennent se ranger au côté de l'Aguellid (roi numide) victorieux.
A Rome le scandale est considérable, la plèbe et le "parti marchand" se soulèvent contre ce gouvernement aristocratique. Une foule de procès politiques sont intentés. Le Sénat casse le nouveau traité de paix. Le consul Spurius Albinus qui a recruté de nouvelles troupes, veut repartir pour l'Afrique, mais les tribuns du peuples ne lui permettent pas d'emmener ces nouvelles troupes. Il part seul et rejoint l'armée qui a pris ses quartiers d'hiver dans la province romaine. Il se rend vite compte que le moral des soldats est au plus bas et décide d'attendre. A Rome, une foule de procès politiques sont intentés à ceux qui ont violé les décisions sénatoriale. Gaius Bestia et Spurius Albinus sont condamnés à l'exil. La guerre va recommencer et un officier expérimenté du parti aristocratique est choisi : Quintus Metellus. Il choisit des officiers issus du peuple, tels Publius Rutilius Rufus et Gaius Marius. Peu confiant dans l'armée d'Afrique, il lève des troupes, mobilise des auxiliaires avec le soutien du Sénat, en fait se comporte comme s'il lançait une nouvelle expédition.
LE CONSUL QUINTUS CAECILIUS METELLUS
Le consul débarque en Afrique en - 109, mais devant la désorganisation de l'armée d'Afrique, il décide de la remettre en état, malgré la volonté de Rome d'en finir au plus vite. Il interdit aux valets de suivre les troupes et aux soldats de se faire aider par des esclaves ou des bêtes de somme. Il déplace chaque jour le camp et fait élever des retranchements. Dès le printemps - 108, il franchit la frontière numide. Voyant cette transformation de l'armée ennemie, Jugurtha fait mine de se soumettre et ses envoyés demandent uniquement la vie sauve pour leur Aguellid.
Metellus n'a qu'une mission, obtenir la reddition à merci et ramener Jugurtha captif à Rome. Il fait donc des réponses évasives et pénètre avec une armée sur la défensive dans une Numidie apparemment en paix. Très méfiant vis à vis de Jugurtha, il est prêt à tout moment à riposter à une attaque soudaine de cavalerie. En chemin, sans que l'Aguellid s'y oppose, il installe une garnison dans la place forte de Vaga (aujourd'hui Béja), gros marché qu'il transforme en dépôt de l'armée romaine. A nouveau interrogé par des envoyés de Jugurtha qui demandaient la paix, Metellus ne refuse pas mais continuer de susciter chez eux la trahison de leur roi. Jugurtha comprend que Metellus agit comme lui et lui fait perdre le soutien de sa population. Il se décide donc au combat et compte utiliser sa connaissance du terrain.
LA BATAILLE DE MUTHUL - 108
Jugurtha anticipe le mouvement de l'armée romaine et place le maximum de troupes dans une vallée déserte où coule le fleuve Muthul et comprenant en son milieu une colline boisée. Cette colline est perpendiculaire au sens de la marche de la colonne romaine. Metellus aperçoit malgré le camouflage les cavaliers numides et sent l'embuscade. Il envoie son officier Publius Rutilius Rufus avec des troupes légères et de la cavalerie pour se porter vers le Muthul et y établir un camp et, avec le reste de l'armée, il se porte, avec Marius, vers la colline. Jugurtha, attend que les derniers Romains soient descendus de la montagne pour y poster 2 000 guerriers afin de couper la retraite aux Romains. Alors Jugurtha donne le signal du combat, La colonne principale est prise à revers par l'infanterie numide et les cavaliers de Jugurtha lui "tombent dessus" depuis les collines. Elle est assaillie de toutes parts et la lutte devient un ensemble de petits combats. La troupe de Rufus est bloquée par Bomilcar qui dispose d'éléphants et d'infanterie et elle ne peut soutenir la colonne principale romaine.
Rufus installe les deux camps. Le combat dure une bonne partie de la journée et enfin le rythme des attaques de la cavalerie diminue et l'infanterie numide remonte sur la colline. Metellus regroupe ses hommes et reforme les rangs face aux Numides. Les légionnaires n'ont pas d'autre solutions que de vaincre et ils escaladent la colline. Alors les Numides, bien que plus nombreux et en meilleure position, décrochent dans combattre. Les légionnaires de Rufus obtiennent le même résultat, et l'attaque numide appuyée sur les éléphants est un échecs, ces pachydermes s'empêtrent dans les branches d'arbres, les légionnaires capturent quatre d'entre eux et tuent tous les autres. Bomilcar et ses Numides s'enfuient.
Les pertes sont lourdes pour les Romains qui restent maîtres du terrain. Metellus comprend que Jugurtha reste déterminé et que les engagements seront meurtriers. Dans l'impossibilité de reconstituer son armée malgré sa victoire, Metellus change sa stratégie et ne recherche plus la bataille. L'armée romaine s'attaque aux plus riches provinces, dévastant et pillant et tuant la population masculine en âge de combattre des cités n'ouvrant pas leur porte, puis installe des garnisons dans les cités stratégiques. Cette politique provoque le ralliement des populations rencontrées prêtes à fournir le ravitaillement dont les Romains ont besoin et à livrer des otages. Jugurtha aussi change de tactique, une grande partie de son armée a profité de la bataille de Muthul pour s'égayer dans la nature. Il ne garde avec lui que des cavaliers d'élite, suit l'armée romaine sans se faire voir, attaque les légionnaires isolés, en particulier les fourrageurs, fait de nombreux prisonniers et s'enfuit avant qu'un secours puisse s'organiser.
A Rome, Metellus est devenu populaire et le Sénat après les échecs précédents, décide des actions de grâce aux dieux immortels. Metellus s'applique à s'assurer de la victoire et interdit le pillage "libre". Pour le ravitaillement en blé et en fourrage, les troupes et toute la cavalerie sont en protection. L'armée est scindée en deux corps, Metellus en commande un et Marius le second. Ils ne sont pas loin l'un de l'autre et continuent de semer la terreur chez les habitants. Jugurtha continue ses escarmouches et empoisonne les sources sur les chemins où les Romains doivent passer.
Lassé de cet ennemi insaisissable, le consul Metellus décide d'attirer Jugurtha en attaquant Zama, une des principales place fortes numides, dans la vallée de la Bagradas. Ce dernier prévenu, avertit les habitants et leur laisse des renforts puis repart en chasse. Il tombe sur Marius venu faire provision de blé à Sicca et attaque, avec ses cavaliers, à la porte de la cité des Romains qui sortaient. Marius réagit rapidement et les Numides sont repoussés. Metellus approche de Zama et se rend compte que la position est favorable à la défense, bien pourvue d'armes et de soldats. Il fait investir complètement la place. Puis il ordonne aux légionnaires d'attaquer la forteresse. Le combat commence et les numides ne fléchissent pas. Ils se défendent avec vigueur et font pleuvoir toutes sortes de projectiles sur les assaillants et en blessent un grand nombre.
Pendant cette attaque, Jugurtha entre en force dans le camp romain et élimine les défenseurs surpris, mais un groupe d'un quarantaine de légionnaires fait face aux cavaliers de Jugurtha et les repousse jusqu'à ce que la cavalerie romaine arrive en renfort. Les pertes sont sévères des deux côtés. Le lendemain, Metellus reprend l'assaut contre la forteresse et Jugurtha attaque le camp romain mais en ajoutant les fantassins aux cavaliers qui ne reculent plus après leurs charges et désorganisent la défense. Autour des remparts, le combat fait rage, et en même temps les défenseurs observent le combat de Jugurtha. Marius s'en aperçoit et relâche la pression et quand ils sont pris par le spectacle, lance un assaut rapide. Les légionnaires sont presque arrivés en haut des échelles, mais les défenseurs se précipitent et attaquent avec des flèches, des pierres et le feu, brisent les échelles et font fuir les assaillants. Metellus comprend qu'il ne peut prendre la ville et l'été finissant, il installe des garnisons dans les cités conquises et bien défendues et repart avec l'armée prendre ses quartiers d'hiver dans la province romaine.
Metellus renoue les négociations avec Jugurtha et gagne Bomilcar, le plus proche conseiller de l'Aguellid. Et ce dernier, persuadé par Bomilcar, accepte de livrer ses éléphants, les transfuges et 300 otages, ainsi que 200 000 livres d'argent que Metellus exige avec sa reddition. Mais convoqué en personne à Tisidium, Jugurtha se ravise et rompt les pourparlers, puis apprenant sa trahison, fait exécuter Bomilcar. Pendant cet hiver, un guet-apens est monté pour éliminer la garnison romaine laissée par Metellus. Un jour de fête, les Romains ne se doutant de rien, tous les officiers sont invités et tués sauf le commandant de la place Titus Turpilius Silanus. Quand aux soldats qui se promènent sans armes, ils ne peuvent y avoir accès et sont lapidés par les habitants qui leur lancent, tuiles, pierres etc... Le commandant qui reste indemne, sera plus tard accusé de complicité avec l'ennemi et condamné à mort. Metellus veut se venger de la cité de Vaga. Il prend une légion et arrive près de la cité en dissimulant les enseignes et précédé par des cavaliers numides largement déployés.
Les habitants croyant que c'est Jugurtha qui arrive, vont au devant des troupes et aussitôt les cavaliers et fantassins s'assurent des portes et des tours, et la cité est livrée au pillage. Marius a demandé depuis longtemps à Metellus un congé pour aller à Rome faire campagne pour les élections consulaires. Metellus n'a pas donné d'avis favorable mais à présent, il le laisse partir car Marius nuisait à son chef auprès des troupes et aussi de tous les commerçants italiens. Metellus se prépare pour une nouvelle campagne contre Jugurtha qui de son côté reconstitue ses armements. Metellus reprend les opérations en - 107, mais Jugurtha reste insaisissable. Il s'enfonce dans les profondeurs du pays et Metellus le rejoint. Le combat s'engage, les Numides sont repoussés et fuient. Les Romains prennent beaucoup d'armes et de drapeaux mais peu de prisonniers. Jugurtha rejoint le désert pour se rendre à Thala, une ville fortifiée où il se réfugie avec sa famille, ses trésors et les meilleures troupes. Metellus l'apprend et il décide de le poursuivre et traverser cette bande de désert d'au moins 50 kilomètres. Pour cela il abandonne ce qui pouvait retarder sa marche et planifie le ravitaillement et l'approvisionnement en eau.
Arrivé devant Thala, il installe et fortifie son camp et la pluie tombe en abondance. Ce signe est pris comme un présage favorable et le siège est entamé avec ardeur. Les Numides surpris de cette traversée, se préparent aussi au combat. Jugurtha réussit à quitter la cité vers le Sud. Le siège dure quarante jours et au dernier moment les transfuges romains détruisent le butin et se donnent la mort.
Dès la prise de Thala, la ville de Leptis Magna demande à Metellus une garnison et un gouverneur que le consul lui envoie bien volontiers. Le Sénat s'apprête à prolonger Metellus comme proconsul en Afrique. Les libres tribus gétules qui ne connaissent pas Rome, se lèvent dans le désert à l'appel de l'Aguellid et accourent en armes. Jugurtha qui est réfugié chez les Gétules, s'emploie à les former à la discipline militaire. Metellus apprend aussi que Bocchus est en train de passer du côté de Jugurtha et que tous deux sont en train de marcher sur Cirta. Metellus ne connait pas les Maures et veut sonder le roi Bocchus. Il apprend que Marius a refusé la prorogation de Metellus et en a appelé au peuple. Il a été élu consul en le critiquant vertement de ne pas vouloir finir cette guerre et il a obtenu le commandement de l'armée d'Afrique pour l'année - 106. Metellus continue de tenter de convaincre Bocchus de ne pas mettre son trône en péril. Démotivé par la prochaine nomination de Marius, le consul ne veut plus prendre de risques et il négocie avec Bocchus qui cherche à adoucir le sort de Jugurtha. Les négociations se prolongent et les opérations militaires sont suspendues.
LE CONSUL GAIUS MARIUS
Marius prépare la guerre, il envoie son légat Aulus Manlius avec des vivres, des armes et de l'argent, pendant qu'il recrute des troupes dont un majorité issue des classes pauvres, les "capite censi", ainsi que des auxiliaires chez les alliés. Il aborde à Utique et le légat Publius Rutilius Rufus lui remet l'armée d'Afrique, Metellus étant parti pour Rome où il est exonéré de toutes les accusations de Marius et obtient le triomphe où il prit le titre de Numidicus. Marius complète les légions et entre en campagne au printemps - 106. Il s'agit de faire mieux que Metellus qu'il a accusé de faire traîner la guerre pour prolonger son commandement ! Il aguerrit les troupes par des opérations peu risquées : attaque contre les Gétules, prise de places de moindre importance et faiblement défendues pour provoquer Jugurtha et le couper de ses sources de ravitaillement. Le butin est important mais Marius est vigilant et maintient la discipline. Toutes les escarmouches finissent par des victoires romaines. Mais même s'il a réussi à tailler en pièces, près de Cirta, les troupes de l'Aguellid qui revenaient avec le butin pris aux alliés des Romains, le but n'est pas atteint et comme Metellus, il envisage de prendre une cité importante.
Son choix se porte sur Capsa et il l'investit par surprise, après une marche dans les déserts, de nuit, des légionnaires uniquement chargés d'outres pleine d'eau. A l'aube quand les habitants sortent de la cité, il envoie ses cavaliers et son infanterie légère, occuper les portes. La cité terrorisée fait sa reddition, mais Marius, violant les droits de la guerre, décide le massacre de la population adulte, l'esclavage pour le reste de la population, le pillage puis la destruction de la cité avec partage du butin entre les soldats. Mais l'armée romaine ne subit aucune perte. Il continue cette tactique avec d'autres cités qu'il prend et dont la plupart sont brûlées et prend ses quartiers d'hiver.
Marius poursuit l'Aguellid qui se réfugie dans le royaume de Bocchus. Le consul décide d'attaquer, près de la frontière entre royaume numide et royaume maure, une position difficile d'accès en raison du relief où Jugurtha a caché ses richesses. Il s'agit de ce qu'on a appelé depuis la Table de Jugurtha. C'est une kaala (montagne calcaire aux parois abruptes) de taille suffisante pour abriter un petit fort, l'armée de Jugurtha et ses chevaux, la population qui le suivait, du bétail, ses silos et ses réserves d'eau, et seul un chemin escarpé y mène. Les techniques habituelles de sièges sont inefficaces et les machines romaines trop avancées sont détruites par le feu ou par les pierres. Le temps passe et Marius est prêt à lever le siège.
C'est alors qu'un Ligure des troupes auxiliaires, se rend du côté du fort opposé à celui où le combat a lieu, et voyant des escargots, les ramasse et ainsi de proche en proche, grimpe sur le plateau en ne rencontrant personne. Il observe attentivement les Numides et redescend par le même chemin puis va trouver Marius et lui propose de conduire des légionnaires par ce chemin. Ayant vérifié ces nouvelles, Marius choisit parmi les trompettes, les 5 plus agiles, leur adjoint 4 centurions et le lendemain, ils grimpent conduits par le Ligure pendant que Marius, par devant, fait avancer la tortue et attaque avec ses archers et ses frondeurs. Les Numides sont devant les remparts face aux légionnaires quand soudain par derrière, les trompettes résonnent. Les légionnaires mettent l'ennemi en déroute et sans s'arrêter au pillage, se précipitent et prennent la place d'assaut.
A ce moment, le questeur Lucius Cornelius Sylla arrive d'Italie avec le corps de cavalerie que Marius lui avait ordonné de recruter. De retour de ce siège, en allant vers Cirta, l'armée romaine est menacée d'enveloppement par les cavaleries des deux rois qui se sont alliés, Jugurtha abandonnant le tiers de son royaume à Bocchus si les Romains sont chassés d'Afrique ou si la guerre lui laisse ses frontières intactes. C'est presque la fin du jour, l'armée romaine n'est pas en formation de combat et l'attaque est soudaine. Les cavaliers numides et maures en surnombre, rompent les rangs des légionnaires mais les vétérans forment le cercle et soutiennent le choc.
Marius et sa garde, dans la confusion générale, aide les siens en mauvaise posture, attaque l'ennemi regroupé mais la nuit tombe. Le consul occupe deux collines voisines, l'une est petite mais pourvue d'une source abondante, il y envoie Sylla et la cavalerie, l'autre est plus vaste et escarpée, facile à défendre. Le consul rassemble les légionnaires et les mène sur cette seconde colline. La position est telle que le combat s'arrête, mais les deux rois installent leurs combattants autour des deux collines. Salluste nous explique que pendant que les Africains "manifestent leur joie par des sauts, des cris pendant la plus grande partie de la nuit". Il ajoute que Marius prescrit un silence absolu. Au point du jour, les Romains attaquent au son des trompettes et surprennent au réveil Maures et Gétules au réveil et ils ne peuvent fuir, leurs pertes sont abondantes.
Continuant son trajet vers Cirta, Marius poste ses troupes comme si l'ennemi était à ses côtés et veille particulièrement à la confection du camp. Arrivés à proximité de Cirta, les éclaireurs rapportent que l'ennemi est là, quatre corps ennemis convergent vers l'armée romaine. Sylla est attaqué en premier et formant ses cavaliers en escadrons serrés, se jette sur les Maures. Pendant ce temps, Bocchus atteint l'arrière garde romaine, Marius étant à l'avant garde où le gros des forces de Jugurtha attaque. Alors ce dernier rejoint Bocchus et s'adresse en latin aux légionnaires. Il leur dit qu'il vient de tuer Marius et que le combat est inutile en brandissant son épée ensanglantée. Les légionnaires sont paralysés et leurs ennemis encouragés. Mais Sylla vient d'éliminer ses adversaires et prend de flanc les Maures. Bocchus se retire, mais Jugurtha ne veut pas laisser échapper la victoire et soutient ses hommes qui sont néanmoins écrasés. Il doit se retirer. Marius pendant ce temps fait fuir la cavalerie ennemie et vole au secours de ses troupes.
Les ennemis sont taillés en pièce, les fuyards poursuivis et capturés. L'armée rentre à Cirta, dans ses quartiers d'hiver. C'est une victoire incontestable et les pertes ennemies sont significatives. Bocchus qui craint que les Romains gagnent la guerre et le traitent en ennemi, envoie à Cirta une ambassade demander l'envoi de négociateurs romains chez le roi des Maures. Marius envoie Sylla et Manlius ce qui représente un risque avec un roi aussi changeant. Sylla prend la parole et tout en rappelant les événements passés, se montre conciliant et le principe d'envoyer une délégation au Sénat est accepté. Puis sous l'influence de Jugurtha, Bocchus change d'avis.
Marius ayant placé toutes ses troupes dans leurs quartiers d'hiver, va mettre le siège devant une forteresse royale où Jugurtha a installés tous les transfuges. Alors Bocchus se décide et envoie 5 députés vers Marius et si ce dernier l'accepte, à Rome, avec le pouvoir de négocier et de conclure la paix. Ces députés sont détroussés en chemin par des brigands gétules et arrivent en piteux état chez les Romains. Sylla les accueillent avec bienveillance et les conseillent sur le langage à tenir avec Marius et devant le Sénat. Marius revient après la prise de cette forteresse et étant avisé des demandes de Bocchus, réunit un conseil qui autorise les députés à se rendre à Rome et un armistice est accordé pendant ce temps. Trois députés deviennent des ambassadeurs et partent pour Rome avec Cn . Octavius Ruson, les deux autres rapportent les faits à leur roi.
Les ambassadeurs plaident la faute du roi entraîné par les menées criminelles de Jugurtha et demandent l'amitié et l'alliance des Romains. Ils reçoivent cette réponse :
- "Le Sénat et le peuple romain n'oublient ni les bienfaits, ni les injures. A Bocchus on pardonne sa faute, puisqu'il la regrette. Un traité d'amitié et d'alliance lui sera accordé quand il l'aura mérité."
Bocchus apprenant cette nouvelle, demande à Marius de lui envoyer Sylla comme plénipotentiaire. Ce dernier part avec une garde de cavaliers et de fondeurs baléares auquel il ajoute des archers et des vélites. Et en chemin, les Romains vont traverser le camp de Jugurtha avec Volux, le fils de Bocchus pour guide et arriver sain et sauf. Bocchus semble prêt à se tourner complètement du côté de Rome, mais quand Sylla lui demande de livrer Jugurtha, il refuse. Puis il cède aux pressions de Sylla et fait venir Jugurtha pour une conférence destinée à la négociation, l'escorte de celui ci est éliminée et il est chargé de chaînes et livré aux Romains en - 105.
A Rome, Jugurtha marche devant le char de triomphe de Marius, le 1er janvier - 104, avec ses deux fils. La guerre a duré sept ans. Le prisonnier est ensuite soit étranglé comme le sera plus tard Vercingétorix, soit mort de faim dans sa prison de Tullianum. La Numidie est partagée entre Bocchus qui agrandit son royaume de Mauritanie et Gauda, le demi-frère de Jugurtha qui monte sur le trône de la Numidie réduite à sa partie orientale. Pendant 40 ans ces "souverains" sont soumis à Rome, jusqu'à l'arrivée de Juba 1er, l'arrière petit fils de Massinissa.